Bobo-Dioulasso, entre ciel et terre : immersion dans la campagne 2025 de saut parachutiste du CITAP
Sous le ciel vaste de Bobo-Dioulasso, le grondement des turbines fend l’air matinal. Un à un, des corps s’élancent dans le vide. Pas pour fuir. Pas pour tomber. Mais pour effectuer des sauts parachutistes.
Ce jeudi 19 juin 2025, à l’aéroport de Bobo-Dioulasso, une chorégraphie millimétrée s'est mise en place, marquant le coup d’envoi de la campagne annuelle de saut parachutiste organisée par le Centre d’instruction des troupes aéroportées (CITAP), structure spécialisée relevant du Groupement Commando Parachutiste (GCP) des Forces Armées Nationales du Burkina Faso.
Pour le commandant de la 2ᵉ région militaire, le Chef de bataillon Lassané Porgo, cette campagne 2025 de saut parachutiste du CITAP est plus qu’un simple entraînement, cette campagne constitue l’un des temps forts de l’année militaire, un creuset où se forge le courage, où se cisèle la précision, et où l'on affine la capacité d’intervention rapide sur n’importe quel théâtre d’opération. Elle se poursuivra jusqu’au 29 juin prochain, mobilisant, dans une discipline de fer et un esprit de corps saisissant, près de 500 militaires issus du Burkina Faso et de dix pays amis.
Plonger dans le vide pour mieux servir la patrie
Le saut parachutiste militaire n’est pas une simple prouesse physique. Il est un acte de foi, une mise à l’épreuve radicale de l’endurance humaine, de la confiance dans le collectif, et de l’aptitude à exécuter une mission dans des conditions extrêmes.
« Chaque saut, c’est un acte de dépassement. Une projection dans l’inconnu. Un choix de servir même dans l’air, là où peu s’aventurent », glisse le chef de bataillon Sami David Palm, Commandant Adjoint du Groupement Commando Parachutiste (GCP) et commandant du Centre d’instruction des troupes aéroportées (CITAP), le regard rivé sur les altimètres.
Dans le jargon des troupes aéroportées, sauter ne signifie pas seulement descendre en parachute : c’est rejoindre le sol avec une mission à accomplir, souvent derrière les lignes ennemies, ou dans des zones d’accès difficile, pour y établir un point d’appui ou exécuter des opérations de neutralisation. D'où la rigueur extrême dans l'encadrement, la préparation et la discipline.
Effectifs engagés : une force en marche
Pour cette édition 2025, 494 personnels militaires sont engagés dans la campagne, dont :
- 149 officiers, figures de commandement et de planification stratégique,
- 97 sous-officiers, piliers de l’exécution et relais tactiques essentiels,
- 258 militaires du rang, véritables bras armés de la mission,
- 15 femmes militaires, fières représentantes de la féminisation progressive de l’armée burkinabè.
À ce contingent s’ajoute une délégation de 25 stagiaires étrangers venus de dix pays partenaires. Une présence qui témoigne du rayonnement régional croissant du CITAP et de la vitalité de la coopération militaire Sud-Sud.
Trois types de sauts pour trois dimensions de la guerre moderne
La campagne 2025 articule son programme autour de trois grandes catégories de sauts, chacune répondant à des objectifs pédagogiques et tactiques spécifiques :
1. Les sauts de brevet
Ils constituent le socle de la formation aéroportée. Ils permettent d’évaluer et de certifier les capacités de base des militaires à sauter dans des conditions standards, à manœuvrer leur voile, à se réceptionner avec précision et à exécuter les consignes en vol. C’est le rite de passage par excellence pour tout soldat aspirant à servir dans les unités d’élite aéroportées.
2. Les sauts tactiques
Ici, l’entraînement devient simulation grandeur nature. Les parachutistes sont largués avec leur armement, leur paquetage complet, parfois même avec du matériel lourd ou des véhicules parachutés en parallèle. L’objectif : répliquer les conditions d’une projection en zone de combat, immédiatement suivie de manœuvres d’occupation de terrain, de repli, ou de poursuite offensive.
3. Les chutes opérationnelles
Réservées aux plus aguerris, ces sauts reproduisent une situation d’intervention réelle, dans des conditions de stress élevé, avec coordination radio, nocturnes ou semi-nocturnes, et parfois même des éléments de simulation ennemie au sol. Ce sont les exercices les plus exigeants, ceux qui testent la réactivité, la cohésion et la résilience des troupes.
Sur le terrain : discipline, coordination et engagement total
Ce vendredi 20 juin, les journalistes ont été conviés à suivre une séquence complète du dispositif, depuis la phase d’embarquement jusqu’à l’atterrissage tactique.
À l’aéroport, les parachutistes s’équipent sous la vigilance inflexible des moniteurs. Chaque sangle, chaque boucle, chaque mousqueton est vérifié à deux, parfois trois reprises. La sécurité est une obsession de chaque instant.
Puis vient le moment décisif : le saut.
Dans un ballet fluide, les militaires se succèdent à la porte de l’aéronef, fixant l’horizon avec calme, puis s’élancent dans le vide. Quelques minutes plus tard, ils touchent le sol de la zone de saut aménagée à l’intérieur du camp Ouezzin Coulibaly. Là, commence l’autre moitié de l’exercice : les manœuvres au sol, les regroupements tactiques, l’acheminement du matériel.
Une école de rigueur, de sacrifice et d’honneur
À travers cette campagne, l’armée burkinabè n’entraîne pas seulement des soldats. Elle forme des esprits prêts à servir dans la difficulté, à opérer loin de leurs bases, et à défendre la souveraineté nationale dans les zones les plus sensibles du territoire.
« Un parachutiste n’est pas un soldat comme les autres. Il sait qu’il peut être projeté à tout moment, dans n’importe quel recoin du pays, et qu’il devra survivre, manœuvrer, tenir. C’est pour cela que ce que nous faisons ici est vital », affirme le Commandant Tampougré SIA, Chef de bataillon, commandant du GCP.
Un message au peuple : entre devoir et fierté
La tenue d’une telle campagne dans un contexte de lutte contre le terrorisme et de reconfiguration du paysage sécuritaire régional n’est pas anodine. Elle envoie un message clair : l’armée burkinabè se tient prête. Elle s’entraîne, elle se renforce, et elle se modernise.
Cette volonté de transparence, matérialisée par l’invitation des médias et d’observateurs civils, vise à rapprocher la nation de ses soldats, à montrer que derrière chaque casque, chaque voile, chaque saut, il y a des hommes et des femmes qui choisissent chaque jour de risquer leur vie pour protéger les autres.
En somme, à Bobo-Dioulasso, ce n’est pas seulement une campagne d’entraînement qui se joue. C’est un serment silencieux répété à chaque saut : celui d’honorer le drapeau, de servir la Patrie, et de rester debout, même dans le vide.
Saidicus Leberger
Pour Faso Patriotes TV