BOBO-DIOULASSO : L’HEURE DE LA RIGUEUR A SONNÉ POUR LES OCCUPANTS ANARCHIQUES DES EMPRISES ROUTIÈRES
Ce jeudi 10 avril 2025, la ville de Bobo-Dioulasso s’est réveillée au grondement des engins lourds et à la poussière des murs abattus. En ce début de matinée paisible, le ballet impitoyable des bulldozers de la mairie a rompu le silence pour entamer une vaste opération de déguerpissement forcé des occupants anarchiques des emprises des routes nationales. Une mesure extrême, certes, mais devenue inévitable face à l’inertie de certains riverains malgré plus de deux mois de sensibilisation, de dialogue, et de délais gracieusement accordés.
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Une phase de sensibilisation longue mais vaine pour certains
Lancée dès le mois de février dernier, cette opération de libération des accotements vise à restaurer l’ordre dans l’occupation du domaine public urbain. Les autorités locales, avec à leur tête le président de la délégation spéciale communale de Bobo-Dioulasso, avaient pourtant multiplié les canaux de sensibilisation : rencontres communautaires, spots radios, affiches explicatives, interventions publiques dans les marchés et quartiers concernés. À plusieurs reprises, la date du déguerpissement avait été repoussée, témoignant de la volonté des autorités d’opter pour une démarche inclusive, humaine et concertée.
Mais cette patience a ses limites. L’ultime réunion de sensibilisation tenue lundi 7 avril avait donné un dernier sursis de 48 heures aux contrevenants. Un "bonus de la dernière chance", comme l’a qualifié le président de la délégation spéciale, dont les propos résonnent aujourd’hui avec gravité :
« Passé ce délai, nos services procéderont à un déguerpissement forcé, même si nous ne voudrions pas en arriver à cet extrême. »
Force est de constater que pour une frange d’occupants, l’avertissement n’a pas suffi. Ce jeudi, la rigueur de l’État s’est donc matérialisée par l’action directe.
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Des scènes chargées d’émotion et de tension
Dans les quartiers concernés, c’est un mélange de stupeur, de résignation et, parfois, de colère. Des femmes aux yeux rougis, des hommes abattus, des enfants hagards observant, impuissants, les tôles, bois et briques de leurs commerces ou habitations emportés par les bras mécaniques. Certains tentaient à la dernière minute de sauver quelques effets personnels, d’autres restaient prostrés, incrédules, face à ce qui ressemblait à un naufrage.
« On savait que ça allait venir, mais on espérait encore un miracle », murmure Sawadogo, commerçant installé depuis plus de quinze ans sur une emprise à Lafiabougou.
« Nous ne sommes pas contre l’ordre, mais nous demandons un accompagnement réel. Nous ne savons pas où aller », confie-t-il, la voix tremblante.
Pourtant, les autorités assurent avoir tout mis en œuvre pour une transition en douceur. Des sites de recasement temporaire ont été identifiés, bien que leur aménagement reste parfois sommaire et insuffisant pour absorber la totalité des déplacés.
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Une nécessité d’aménagement urbain
La ville de Bobo-Dioulasso, deuxième cité du Burkina Faso, fait face à une pression urbaine croissante. L’occupation anarchique des accotements entrave non seulement la circulation, mais expose les populations à des dangers multiples : risques d’accidents, insécurité, insalubrité, et obstacles majeurs aux services de secours.
La volonté des autorités s’inscrit ainsi dans une dynamique de transformation structurelle de la ville. Il s’agit de restaurer les normes d’urbanisme, de fluidifier la mobilité urbaine et de permettre une meilleure accessibilité aux services essentiels.
« On ne peut plus continuer à fermer les yeux sur des installations qui compromettent l’intérêt général. Notre devoir est d’assurer un cadre de vie sain, sécurisé et harmonieux pour tous les Bobolais », a martelé un conseiller municipal présent sur le terrain.
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Un test pour la légitimité des autorités locales
Cette opération est également un test grandeur nature pour la délégation spéciale, installée dans un contexte politique national marqué par des bouleversements et une quête renouvelée de légitimité populaire. Entre nécessité de fermeté et devoir de justice sociale, l’équation est délicate.
Nombreux sont les observateurs qui saluent la détermination affichée mais soulignent que celle-ci doit impérativement s’accompagner d’un dialogue continu et d’un soutien concret aux populations touchées.
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Vers une refondation de l’espace public urbain ?
Au-delà de l’émotion suscitée par cette journée douloureuse, c’est toute la question de la gouvernance urbaine qui est posée. Le tissu social de Bobo-Dioulasso, composé en grande majorité de travailleurs informels, vit au jour le jour. Pour que la libération des voies ne se traduise pas en précarisation accrue, des mécanismes d’accompagnement social, économique et psychologique devront être déployés sans délai.
Dans une ville où l’informel reste le cœur battant de l’économie locale, la reconversion des activités déplacées, la promotion de solutions innovantes de commerce légal et l’inclusion des riverains dans les processus décisionnels seront des facteurs clés de succès.
Conclusion
Le déguerpissement forcé de ce jeudi 10 avril 2025 marque un tournant dans la politique urbaine de Bobo-Dioulasso. Il est le signe d’une volonté affichée de rompre avec l’anarchie tolérée au fil des ans. Mais ce tournant ne pourra porter ses fruits que s’il s’inscrit dans une vision globale de développement urbain, juste, inclusive et humaine. Car l’assainissement du domaine public ne doit jamais être une fin en soi, mais un moyen au service de la dignité collective et de la renaissance urbaine.
Saidicus Leberger
Pour Faso Patriotes TV